Comment le Théâtre contribuerait à un meilleur questionnement de certains aspects de l’Autisme 2

Posted by on Avr 11, 2014 in Blog

La comparaison entre les faux médecins et les faux acteurs est venue d’elle-même à l’esprit parce que, de plus en plus souvent, lorsqu’on parle d’autisme, on se met imaginer que faire « un peu de théâtre » ça ne ferait pas de mal à ces jeunes malheureux qui sont coupés des autres et du monde. C’est une idée un peu simpliste quand on connait les difficultés presqu’insurmontables qui se dressent devant soi dès qu’on s’efforce d’entrer en contact avec ces jeunes qui donnent l’impression de rester murés en eux-mêmes. Et c’est une idée d’autant plus simpliste qu’elle s’appuie sur une conception erronée sur le rôle du théâtre par rapport à ce qu’il est convenu de traiter de communication. D’ailleurs, il est important de constater qu’un minimum d’observation et surtout d’écoute des autistes, remet en question ce dont on était persuadé en ce qui concerne la structuration de la démarche théâtrale ! Oui, paradoxalement, la première remise en cause, dans ce rapprochement entre l’autisme et le théâtre, ne touche pas l’autisme mais, au contraire les idées toutes faites qu’on avait sur le théâtre. Certes, nous n’avons pas attendu de nous interroger sur l’autisme pour questionner le « fonctionnement », la possibilité d’être du théâtre, mais il fut intéressant de constater que nombre de constats que nous faisions en prêtant attention aux autistes et à ce que certains d’entre eux étaient en mesure de dire, entraient en écho avec  bien des réflexions auxquelles de nombreuses années avec le théâtre nous ont conduits.

Encore une fois, les autistes auxquels je fais allusion, sont des cas particuliers dont les paroles sont insuffisamment nombreuses pour qu’on se mette à croire qu’il suffirait d’interroger tous ceux que l’on a classés dans » la catégorie autiste » pour connaitre leur réalité et leur point de vue. Beaucoup trop d’entre eux ne maitrisent pas l’expression verbale, n’en éprouvent pas le désir ni encore moins l’intention. A ce sujet, il ne faut pas confondre l’autisme avec la surdité profonde laquelle entraine, ou est corrélative avec, l’incapacité de s’exprimer verbalement. Il s’agit plutôt là d’un obstacle organique, encore qu’il ne faille surtout pas le détacher de certaines causes et, bien sûr, de ses conséquences psychologiques. Cette remarque me donne l’occasion de rappeler la souffrance, particulièrement sociale, endurée par les malentendants  que nos société traitent avec une scandaleuse désinvolture. Pourtant, l es malentendants ont beaucoup à nous apprendre en ce qui concerne la constitution du sens chez les hommes, ils ont autant à nous apprendre que les aveugles et ne sont pas « moins voyants qu’eux ».

Pour ce qui concerne les autistes, à supposer qu’une telle généralisation soit viable, la problématique semble se poser d’abord dans le champ de la psyché. Toutefois, il y a diverses façons de décliner les problématiques issues de la psyché et certaines n’ont d’autre rapport avec cette dernière que de s’appeler « psychologies », même si ces psychologies ne sont que du sociologisme et du comportementalisme individuel. L’énigme autiste s’enracine dans la psyché, je le ressens profondément quand je remarque que nombre d’entre eux n’éprouvent ni le désir ni encore moins l’intention de s’exprimer verbalement. Ceci n’est pas le cas pour les mal entendants, dont il ne faut pas prendre la lassitude sociale pour un manque de désir et d’intention qu’ils reportent en direction de leurs « semblables ».