Mises au point quant à l’identification et au personnage
A l’écoute des radios, à la lecture des livres et des journaux, je me rends compte que tout le monde fait référence à l’identification et j’en arrive à me demander si ce n’est pas fantasme, de ma part, que de croire celle-ci mise à l’écart. Bien sûr, le « politiquement correct » voue l’identité aux gémonies quand on la pousse jusqu’à l’identitarisme, mais, sans céder au fanatisme, la majorité de nos concitoyens semble persuadée d’être « quelque chose » plutôt qu’une autre. Il n’en reste pas moins, dans notre société, un certain malaise entoure ces notions. Ce malaise est d’autant plus perceptible dans les milieux dits intellectuels, qu’on y hésite à les utiliser pour soumettre des réflexions dites sérieuses. Certes, ce ne sont pas les lubies des théoriciens de toutes catégories (à l’exclusion des psychanalystes), ni non plus les préoccupations de « l’avant-garde » théâtrale qui vont donner à penser que l’opinion ne pense plus la même chose, mais les soubresauts de la mode ne sont pas des soubresauts de dernière extrémité, souvent ils ont l’avenir devant eux. Comme son nom l’indique, l’opinion est ce qui opine, et si le fait d’agiter le pompon qu’on a sur la tête marque, dans un premier temps, quelque hésitation, cela finit, la plupart du temps, en mouvement d’approbation. On ne doit pas négliger la puissance de la « tendance », beaucoup de femmes qui, à l’époque, ont haussé les épaules devant l’apparition de la minijupe, n’ont pas manqué, en un même temps, de ne plus porter de robes jusqu’aux chevilles. Souvent, la mode a le dernier mot, ceci d’autant plus que ce jour là, elle commence à se démoder. Il y a « tendance » à renier l’identification, particulièrement dans un monde qui reposait, en grande partie, sur elle : le théâtre ; mais le plus amusant – ou le plus triste -, est que les spectateurs croyant, dur comme fer, en l’identification, soutiennent des artistes qui déclarent s’en libérer, ceci dans la plus grande confusion. On vote sans hésiter pour quelqu’un dont on désapprouve concrètement le programme, de même façon qu’on présente un programme qu’on se gardera de mettre en pratique, plutôt qu’un autre dont on sait ne pas avoir l’image ni la compétence. Est-ce de l’hypocrisie réciproque ou, tout simplement, une perte de crédit en ce que l’on dit et ce que l’on croit ? Il n’en reste pas moins que, se moquant des non-faits et des non-dits, la « tendance » avance.
Read MoreL’identification passe par le sommeil (!)
Pas facile de comprendre ce qu’est le jeu de l’actrice et de l’acteur ! Pour ce qui concerne les joueuses et les joueurs des autres jeux sportifs ou « de société », on croit l’avoir compris depuis longtemps, mais en ce qui concerne le jeu dramatique ? Existerait-il une différence ? Est-ce que là aussi, en raison de la différence entre les éléments dont on se sert pour jouer, en raison du jeu qu’il y a entre eux, il suffirait de les manipuler, les intervertir, les monter comme on le fait au cinéma en montant les plans et les séquences (on prend trop souvent pour cinéma d’art et de recherche un cinéma qui se contente d’être un cinéma de montage – n’hésitez pas à saisir toutes vos photos de vacances, à les projeter à toute vitesse dans un certain ordre, puis dans un autre, tout aussi aléatoire, vous aurez surement des amis qui vous décerneront un prix de la mise en scène) ? Depuis toujours, nombre d’artistes du spectacle vivant procèdent ainsi, même sans outils, sans accessoires, simplement avec les éléments qui les constituent, tant ceux de leurs membres, de leur voix, de leur esprit que de leurs organes (pensons aux pétomanes qui firent fureur au 19eme siècle, d’ailleurs les « mots d’esprit » ne sont-il pas des pets de l’esprit ?). Après tout, l’actrice et l’acteur n’ont-ils pas la même pratique que tous ceux qui se manipulent ? J’aurai beau crier non ! il y a fort à parier que je ne convaincrai pas grand monde. Alors, j’avancerai le terme d’identification et parmi la foule des « bien sûr, c’est évident, c’était pas la peine de le dire », on entendra quelques ricanements suivis de commentaires à couper au couteau : « l’identification, il en est encore là », « l’identification, quelle horreur », « quand on pense qu’on s’est tant battu pour la combattre » ! Je le reconnais, l’identification n’a pas bonne presse même si la majorité des gens ne s’en doute pas et s’empresse de porter aux nues ceux qui, par ailleurs, la condamnent sans appel.
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